Le coiffeur de théâtre


Ce petit texte est extrait de " LaPhysiologie du COIFFEUR , de L.Lemercier de Neuville , en1862

          Lecoiffeur de théâtre m'a toujours fait l'effet d'un roman-feuilleton

Il faut qu'il commence à l'heure et finisse juste. Le vicomte Ponson du Terrail n'est pas plus exact.

Le coiffeur de théâtre est l'Eugène de Pradel de la coiffure : il improvise sur tous les sujets donnés.
Quelle fécondité d'imagination ! quelle science de la mode à toutes les époques ! quelle activité ! quel dévouement ! Mais, très-franchement, j'admire cet homme qui a le privilège de passer ses doigts sur des têtes du dix-neuvième siècle et de les métamorphoser soudain en Romaines incestueuses, en reines adultères, en fées, en houris, ou bien en simples paysannes !
 
Aussi, est-il respecté ! est-il cajolé ! est-il redouté !

       Car, voyez les conséquences d'une vengeance !

Une tresse mal attachée, une perruque qu'enlève le chapeau, un catogan mis de travers, du crépé qui ne tient pas, des perles qui se déroulent, des fleurs qui se détachent, etc,etc., toujours au moment le plus intéressant : la scène d'amour, la scène du duel ou la scène des reconnaissances. Une queue par terre au cinquième acte ! Quel dénouement 


Je ne  considère le coiffeur de théâtre que comme coiffeur de dames ; pour les hommes, il n'est guère qu'un perruquier. L'artiste relève ses cheveux et tend la tête ; le coiffeur lui pose la perruque frisée, pommadée, en un mot sirotée d'avance.


J'emploie exprès le verbe siroter, il appartient au vocabulaire des coiffeurs. Une tête est bien sirotée quand elle a été nettoyée, peignée, tondue, pommadée, frisée, etc.

Le coiffeur de théâtre fournit aux artistes, pommades, fards,perruques, crépés, etc.


           Cependant certains artistes font eux-mêmes leur blanc ... ily ena qui font leur tête !

           Comme caractère, le coiffeur de thâtre fait partiede lagrande famille des artistes dramatiques.

    * Ils'informe du succès de la débutante, de lapièce nouvelle ;
   * il sait les engagements prémédités,lespièces en répétition, les critiquesdes petitsjournaux, les mutations des artistes, les corrections de la censure,les intrigues de la jeune première et les bonnes fortunes dugrand premier rôle.

Il est un peu - comment dirai-je ? - un peu complaisant, il sait faire passer la rampe à un billet qui vient de la salle, ou même du  dehors ; c'est un habile ! Mais, comme  dit Figaro son patron : "Il n'y a que les petits hommes qui redoutent les écrits."



 
 
A suivre : le coiffeur  vieille  comtesse